Le jeu du train - 1er compartiment
1er Compartiment
Le train serpente à travers la campagne, glissant silencieusement sur ses rails comme un géant paisible qui ignore les tumultes humains à bord. À l'intérieur, Claire et Émilie se trouvent côte à côte dans cet espace confiné, mais familier. Les sièges en velours bleu, usé par les trajets incessants, ont vu défiler leurs rires et leurs confidences au fil des mois, transformant ce train en une extension de leur propre salon. Claire, les cheveux châtains tombant en cascade autour de son visage, observe distraitement les champs verdoyants qui s’étirent à l’infini. À ses côtés, Émilie, dont les yeux clairs reflètent une vive intelligence, feuillette machinalement un magazine qu'elle n’a pas vraiment l’intention de lire. Elles ont pris l'habitude de ces trajets ensemble pour se rendre au travail. Chaque voyage est une occasion de discuter des aléas de leur vie personnelle ou professionnelle, ou simplement de se retrouver après des journées chargées.
Ce jour-là, le trajet est particulièrement monotone. Claire, la mine renfrognée, est visiblement fatiguée. Son esprit ne pense qu'à une chose : retrouver son canapé et se perdre dans un marathon de séries. À côté d’elle, Émilie, plus enjouée, finit par poser son magazine, incapable de se concentrer. Son regard vagabonde sur les passagers, cherchant un quelconque divertissement. Elle observe attentivement les voyageurs, absorbés par leur téléphone ou plongés dans leurs pensées. Soudain, il lui vient une idée, une idée parfaite pour réveiller son amie.
— Claire ! Et si on se lançait des défis pendant le trajet ? Propose Émilie avec un sourire malicieux illuminant son visage.
— Quel genre de défis ?
— Je ne sais pas encore, on verra bien ! Tu fais la tête depuis que le train est parti, et moi je m’ennuie à mourir. Je sens qu’on va bien s’amuser, dis oui… s’il te plaît…
— Bon, d’accord, on joue ! lance Claire, sa curiosité piquée.
Elles commencent par des gages légers, des défis simples et innocents destinés à ajouter une touche de divertissement à leur voyage. Leur premier challenge est pour Claire : faire un clin d'œil à un inconnu dans le compartiment. L’idée est de le faire discrètement, sans attirer l'attention, juste pour voir la réaction de l’autre personne et pour s’amuser ensemble du résultat. Claire, prenant son rôle très au sérieux, tourne la tête vers un homme assis à sa gauche et lui lance un clin d'œil complice. Emilie éclate de rire en voyant la réaction amusée de l’homme, qui semble un peu surpris, mais pas vraiment dérangé. Encouragées par ce succès, elles continuent avec un défi tout aussi innocent, mais légèrement plus audacieux.
— Tu vas t’asseoir dans le carré famille qui est vide et faire semblant de discuter avec un passager imaginaire. Je m’assois pas loin et je profite du spectacle, lui propose Claire.
— Cap ! répond Émilie, sans hésiter une seconde.
Elle s’installe et commence à faire semblant de s’adresser à un mari imaginaire. Elle se lance dans une tirade fictive, mimant des gestes grandiloquents tout en chuchotant des phrases absurdes. Les passagers alentour jettent des regards curieux. La plupart ne peuvent s’empêcher de sourire en voyant Émilie en pleine performance, se demandant si elle est en train de jouer un rôle ou si elle est simplement un peu folle.
Claire, ravie de cette prestation improvisée, rejoint Émilie avec un rire contagieux. Elles s’éloignent dans le couloir, en discutant joyeusement. C’est décidé : pour chaque challenge un nouveau wagon, il leur faut un public neuf et totalement ignorant de leur jeu.
— Et si, à chaque compartiment, les défis montaient d’un cran ? Propose Émilie avec un sourire espiègle.